Public Project
Pāri Mūriem
They are ten, they are between 16 and 21 years old and live at the Cēsis Juvenile Detention Center (CAIN) in Latvia. We worked together in January and February 2018, I spoke about photography in weekend workshops and gave to each of them a simple analog camera and two films, they photographed their daily life, focusing on content, not technical skill. I did the same and at the same time, I took portraits of them in locations within the prison they chose themselves. Then I asked them to name a place dear to them outside the prison walls, and traveled through Latvia to photograph landscapes that the young men couldn’t visit themselves.
Through the images, we learned about each other. Some were eager to share, some less. I did not want to know why they were incarcerated. My idea was to bring them a kind of freedom through the camera’s viewfinder; not to remind them once more of the crime committed. It seemed a heavy burden to carry at an age when you should be building your future.
When we have begun the project, I expected it to be a collaboration between the detainees and myself. However, I soon realized there was a third partner involved – the prison itself. Perhaps naively, I had not expected to face censorship, but any closed institution enforces its own rules. New ones appeared as the project progressed. I had to develop each film within the center’s walls. The images created by the participants were scrutinized closely by the security staff – I was ordered to alter them and remove the identities of other detainees, as well as details of the environment and the prison's staff. The tool provided to alter the photographs was a knife, in which CAIN was engraved. At this moment, our work seemed irreversibly destroyed. However, the alteration of the photographs – a physical imprint of the prison's environment – acted as a symbolic embodiment of the violence and control of incarceration. The three versions of one closed environment ultimately produce a more complete picture.
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Story lead within the frame of the artist residency Rucka, 2018
a book is in the making, see below the dummy.
printed in the French quarterly De L'Air, 2019
published online by Prison Insider, 2019
exhibited in Cēsis, 2018
Nous sommes en janvier. Il neige. Dans le sas d’entrée de la prison pour mineurs de Lettonie, à CeÌ„sis (CAIN pour CeÌ„su AudzinaÌ„sÌŒanas iestaÌ„des nepilngadiÌ„gajiem), j’attends la vérification de mon identité. Un peu anxieux de l’expérience à venir, je regarde "¨les flocons tomber de part et d’autre de l’enceinte, au gré du vent. Je ne peux m’empêcher de faire"¨ des comparaisons faciles ou hasardeuses sur la part d’aléatoire qui nous mène d’un côté et de l’autre"¨de ces murs.
Je me demande aussi comment j’en suis arrivé à vouloir passer librement et volontairement de l’autre côté.
Mes papiers sont en règle. Je suis fouillé. Je pénètre"¨le territoire de l’administration carcérale lettone."¨ Enchaînement de portes, de grilles, de barbelés et "¨de caméras, grésillements et échos des talkies-walkies. À l’intérieur, l’obsession sécuritaire dédiée à seulement trente-neuf jeunes m’étonne ; la prison en accueillait près de deux cent cinquante au début des années 1990. Le rapport est saisissant.
Certes, les conditions de détention se sont améliorées : en 2011 et 2012, grâce à des financements de l’Union européenne et de la Norvège, le CAIN a été rénové. Désormais, les jeunes détenus purgent leur peine en cellule double et non plus en dortoirs de vingt-cinq lits. Ils étudient dans une école et se dépensent dans un gymnase fraîchement rénovés.
Avec une capacité d’accueil de cent soixante-quatre détenus, l’établissement ne risque pas la surpopulation. Ce décalage me laisse perplexe. Je ne connais "¨pas la cause de l’incarcération de ces adolescents et ne chercherai pas à la connaître. Je sais seulement que certains d’entre eux purgent de lourdes peines. Je voudrais croire qu’il existe d’autres solutions"¨ à la privation de liberté.
Dans une petite salle, j’attends A, D, D, E, I, I, I, N, O et R. Ils entrent. Nous nous présentons les uns aux autres. Moi, en anglais, à l’aide d’un PowerPoint. Eux, en letton ou en russe, à l’aide d’une ferme poignée de main. Ils ont entre "¨seize et vingt et un ans. Nous nous comprenons grâce"¨à Zane, notre interprète. Quelques semaines plus tôt, ces dix jeunes ont accepté ma proposition d’ateliers photographiques collaboratifs. Pour cela, je suis venu équipé de dix appareils argentiques et de deux pellicules par participant.
Pendant un mois, nous nous retrouverons chaque week-end pour parler de photographie. Durant la semaine, ils seront mes yeux à l’intérieur de la prison et je serai "¨les leurs à l’extérieur, où j’irai photographier pour chacun d’eux un lieu qui leur est cher. Ainsi grâce à eux, j'ai voyagé à travers la Lettonie et y ai photographié des paysages que ces jeunes hommes ne pouvaient plus visiter. J'ai accompagné chaque paysage par leur portrait réalisé dans un endroit de la prison qu'ils avaient choisi.
Ensemble, nous faisons le mur.
Mais nous sommes rappelé à l’ordre et l’administration carcérale s’immisce dans notre travail. Je ne m’attendais pas à être confronté à la censure puisque tout avait été à priori décrit et validé : il m’a été demandé de développer les films derrière les barreaux pour qu’ils puissent y être examiné par le personnel de sécurité qui m’a ordonné d’éliminer des « éléments sensibles » sur les négatifs à l’aide d’un couteau de cuisine fournit. Ainsi, ce sont les images où figurait des détenus n’ayant pas participé aux ateliers, le personnel pénitentiaire et le mur d’enceinte qui ont été altérées. Que ces éléments soient déjà flous ou que les personnages soient de dos n’avait pas d’importance, il fallait gratter.
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Projet réalisé dans le cadre de la résidence d'artiste Rucka, 2018.
un livre est en cours de réalisation, voir la maquette en bas de page.
publié dans le trimestriel français De L'Air, 2019
publié en ligne par Prison Insider, 2019
exposé à Cēsis 2018
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