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RDC: les LGBTI du Sud-Kivu demandent à ne plus être discriminés
esther nsapu
May 4, 2020
L’homosexualité n’est pas hors-la-loi en RDC, mais les lesbiennes, les gays, les bisexuels, les transgenres et les Intersexués (LGBTI) sont mal vus au sein de la société et sont régulièrement traités comme des criminels. Ils sont parfois harcelés et menacés par les membres de leurs familles.
Les violences arbitraires et la discrimination dont sont victimes ces personnes ont des conséquences graves sur leur quotidien.
Régulièrement, les personnes LGBTI se voient battus et agressés par des groupes de jeunes que ce soit dans leur quartier ou dans la rue.
Ils sont fréquemment injuriés et on les accuse de tous les maux telle que la sorcellerie ou même parfois d’être responsables des malheurs du pays. Ces personnes trouvent difficilement du réconfort dans leurs familles qui parfois les rejettent. Socialement, leur vie est un calvaire car le travail leur est refusé et ils sont parfois excommuniés de leurs églises. Peu d’entre eux terminent leurs études, notamment les homosexuels en raison d’une part des violences subies mais aussi parce que les directeurs d’écoles ou d’universités craignent qu’ils influencent les autres élèves. Et pourtant, l’homosexualité est dépénalisée en RDC.
Pour survivre, ces personnes se prostituent.
« La prostitution s’avère notre seule porte de sortie. Nous ne sortons que la nuit par peur d’être lapidés. Ma famille m’a abandonné. Je vis avec mes amis qui sont comme moi et avec qui je me sens en sécurité. En ville de Bukavu, je ne peux sortir comme je le voudrais car ils ont promis de me tuer », se plaint Amanda.
A Bukavu au Sud-Kivu, deux organisations de défense des droits des personnes LGBTI militent en faveur des minorités sexuelles : l’Action pour la lutte contre l’injustice sociale (ALCIS) et Rainbow Sunrise Mapambazuko. Ces organisations s’emploient à renforcer la tolérance et à exhorter les gens à dénoncer officiellement les cas de violence.
Au cours d’un atelier organisé ce 22 mai 2019, ces deux structures de la société civile ont appelé les populations, mais aussi les autorités et les institutions, en particulier la police, à traiter les personnes LGBTI comme n’importe quels citoyens congolais et de respecter leurs droits. Plus spécifiquement, ces organisations ont demandé à ce que les personnes LGBTI soient prises en compte dans la mise en œuvre des Objectifs de Développement Durables d’ici 2030.
D’après Alphonse Mihigo, président de l’organisation Action pour la lutte contre l’injustice sociale (ALCIS), « La RDC fait partie des Etats membres de Nations Unies ayant souscrit au nouvel agenda International de Développement Durable. Cet agenda 2030 prône l’universalité, l’intégration et l’inclusivité et vise à ne laisser personne de côté. Malheureusement sa mise en œuvre pose problème car les politiques répressives à l’encontre des personnes LGBTI continuent à prendre de l’ampleur au Sud-Kivu« .
Au cours de l’année 2017, ce groupe a publié plusieurs rapports dénonçant la violence contre la communauté LGBTI, en particulier celle contre les travailleurs du sexe gay. Ce document dépeint une situation où cinq homosexuels ont été forcés de fuir leur maison quand cette dernière a été perquisitionnée par la police. Les cinq personnes ont été battues par la police et chassées de leur quartier.
Avec 327 membres en son sein, l’organisation Rainbow Sunrise Mapambazuko a documenté 657 cas de violations des droits de personnes LGBTI depuis 2010 en ville de Bukavu. Jérémie Safari, coordonnateur de cette structure, précise que 80% de ces violations ont été commises par les membres de la communauté et 20% par les agents de l’ordre. Les principaux cas de violation des droits de la personne concernent les arrestations arbitraires, les agressions, les discriminations en tout genre (refus de soins, renvoi de l’école, renvoi du travail,…) mais aussi des « viols collectifs ». Ces derniers sont particulièrement traumatisants pour les victimes. En effet, les auteurs de ces viols disent violer la personne homosexuelle pour la « ramener dans le droit chemin », c’est-à-dire pour l’amener à redevenir hétérosexuelle.
« Le programme 2030 visant à atteindre les Objectifs de Développement Durable est « un programme du peuple par le peuple et pour le peuple » qui s’adresse à toute la nation et à tous les groupes sociaux. A partir de maintenant, lors de conception de politiques nationales et lors de consultations avec les différents groupes sociaux, il ne faudrait plus oublier les personnes LGBTI. Faisons entendre notre voix et prenons tous part au changement ! », a-t-il dit.
À la différence d’autres pays de la région comme l’Ouganda et le Kenya, la RDC n’a jamais pénalisé l’homosexualité. Mais l’acceptation sociale des LGBTI demeure un défi dans ce pays.
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