Lwiro, ce nom évoque à la fois la beauté de la nature et la richesse d'un passé scientifique. Esther N'sapu, en explorant les lieux et en recueillant les témoignages des anciens, offre une immersion totale dans l'histoire de ce centre de recherche. Chaque photographie est une fenêtre ouverte sur un temps révolu, chaque récit une brique supplémentaire ajoutée à l'édifice de la mémoire.
L'artiste ne se contente pas de documenter l'architecture du lieu, elle en dévoile l'âme. Les murs défraîchis, les objets poussiéreux, les visages marqués par le temps... tout concourt à créer une atmosphère chargée d'émotion. Les portraits des anciens employés, capturés avec une grande sensibilité, témoignent d'une vie passée, d'un savoir-faire ancestral.
« Je me suis dit les oubliés parce que les touristes, chercheurs, étudiants passent par Lwiro mais oublient que ces personnes existent, ces personnes ont besoin de notre attention et que ces personnes sont les derniers témoins de l’histoire de ce centre des recherches en sciences naturelles », a expliqué Esther N’sapu à ACTUALITE.CD.
“Les oubliés de Lwiro” est bien plus qu'une simple exposition de photographies. C'est un véritable projet de mémoire, un hommage rendu à ceux qui ont œuvré pour la science et le développement de la région. En associant les images aux récits, l'artiste crée une œuvre hybride, à la croisée du documentaire et de l'art contemporain.
Les témoignages recueillis sont d'une richesse inestimable. Ils parlent de la vie quotidienne au sein du centre, des relations entre les chercheurs et la population locale, des espoirs et des désillusions. Rappelant l’existence de plusieurs sites touristiques qui entourent le village de Lwiro notamment le parc Kahuzi biega, les chutes de Kibati, la bibliothèque de Lwiro, des chimpanzés sauvés du braconnage qui attirent les touristes.
En choisissant de mettre en lumière l'histoire du Centre de Recherche de Lwiro, Esther N'sapu s'inscrit dans une démarche résolument politique. Elle rappelle que l'histoire d'un pays ne se résume pas aux grands événements, mais qu'elle se construit aussi dans le quotidien des individus.
Le village de Lwiro est le village de ses grands-parents maternels, le grand-père ayant travaillé plus de 60 ans dans le centre des recherches en tant que menuisier. Il a construit la bibliothèque de Lwiro, des meubles qu’on retrouve dans la guest house. Malgré cela, l’accès n’a pas été garanti dans ce village, Esther N’sapu a dû effectuer différents voyages notamment à Goma et Bukavu pour en arriver à cette œuvre.
En voulant exposer son travail à Goma et à Lwiro après l’exposition de Kinshasa, l'artiste souhaite redonner aux habitants de ce coin du pays un sentiment d'appartenance à leur histoire. Elle espère ainsi susciter un élan de solidarité et encourager la préservation de ce patrimoine unique. L'exposition d'Esther N'sapu est une invitation à la réflexion sur le temps qui passe, sur la mémoire et sur l'importance de transmettre l’histoire et ses acquis aux générations futures.
Texte: Kuzamba Mbuangu
Photos: Esther N'sapuEsther N'sapu, photographe congolaise, pose un regard sensible et engagé sur l'histoire de son pays, dans le village de Lwiro au Nord-Kivu.
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