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• L’histoire de Sophea et des Khméricains du Cambodge
Sophea est née dans un camp de réfugiés à la frontière Thaïlandaise le 28 mai 1982. Elle n’a pas connu son père, parti avant sa naissance. Sa mère, elle, a fui Phnom-Penh à l’arrivée des Khmers Rouges dans la capitale cambodgienne, perdant ainsi toute sa famille. Sa mère avait 5 frères et une sœur et ne les a plus jamais revus depuis cette fuite. En Décembre 1983, après un an dans ce camp, Sophea et sa mère ont été envoyées aux Etats-Unis. Sophea n’a jamais su pourquoi les Etats-Unis plutôt que la France ou l’Australie, cela semble avoir été décidé de façon aléatoire dans le programme des réfugiés.Elles sont arrivées au Texas et se sont installées par la suite à Long Beach en Californie pour rejoindre le nouveau compagnon de sa mère. Elles habitaient dans un quartier pauvre où vivait une grande majorité de réfugiés cambodgiens. Sophea a grandi comme une jeune américaine, s’intégrant tant bien que mal à une société étrangère mais qui devint la sienne. C’était une enfant intelligente, mais elle se sentait isolée et seule parce qu’elle « n’avait pas de vrai père ». C’est durant ses études secondaires qu’elle commença à fréquenter les gangs cambodgiens. Elle a rencontré son mari en 2001, un marine, et a accouché de son garçon en 2003. Son mari l’a quitté à ce moment. Elle s’est donc retrouvée jeune mère célibataire sans emploi. Influencée par « de mauvaises personnes » comme elle les qualifie, elle s’est lancée dans une arnaque à la carte de crédit et a été condamnée à 2 ans de prison dont un an ferme.
Après avoir purgé sa peine, elle est restée en liberté surveillée. Pour ne pas retomber dans les mêmes travers, Sophea a trouvé du travail et a repris le cours de sa vie malgré les rumeurs sur les déportations de Cambodgiens. Mais un jour de 2009, les agents de l’immigration l’ont informé que les papiers du Cambodge pour la déportation étaient arrivés. Au bout d’un mois de détention, Sophea a été déportée seule au Cambodge ; un pays qu’elle ne connaissait pas et dont elle ne parlait même pas la langue. Son fils, alors âgé de 8 ans est resté aux Etats-Unis avec son père.
Depuis 2002 et un accord bilatéral avec le Cambodge, les Etats-Unis expulsent vers Phnom Penh des jeunes d’origine cambodgienne comme Sophéa, qui ont commis des délits sur le sol américain. Résidents, et non pas citoyens américains, les enfants des victimes de Pol Pot, élevés aux Etats-Unis, sont du jour au lendemain renvoyés sur la terre de leurs ancêtres, dans un pays qu'ils n'ont souvent jamais connu et où ils n'ont aucune attache.En dix ans, près de 560 Cambodgiens Américains, les Khmericans, ont été renvoyés au Cambodge. La plupart sont de jeunes hommes, anciens membres de gangs mais les histoires peuvent aussi être différentes comme Sophéa. Le rythme des retours s'est accéléré avec le durcissement de la politique migratoire américaine : plus de 2000 Khméricains sont menacés de déportation. Pour faire avancer leur cause, le collectif 1Love Cambodia dont fait parti Sophéa a décidé de se tourner vers le gouvernement cambodgien pour demander une révision de cet accord bilatéral.Depuis Août 2017, des négociations entre le gouvernement américain et cambodgien seraient en cours.
Sophea was born in a refugee camp on the Thai border on 28 May 1982. She did not know her father, who left before she was born. Her mother fled Phnom-Penh when the Khmer Rouge arrived in the Cambodian capital, losing her entire family. Her mother had five brothers and one sister and has never seen them since. In December 1983, after a year in the camp, Sophea and her mother were sent to the United States. Sophea never knew why the United States rather than France or Australia, it seems to have been decided randomly in the refugee program. They arrived in Texas and later moved to Long Beach, California to join her mother's new partner. They lived in a poor neighbourhood with a large majority of Cambodian refugees. Sophea grew up as an American girl, struggling to integrate into a society that was foreign but became her own. She was an intelligent child, but she felt isolated and alone because she "didn't have a real father". It was during her high school years that she began to associate with Cambodian gangs. She met her husband in 2001, a marine, and gave birth to her son in 2003. Her husband left her at that time. This left her as a young single mother with no job. Influenced by "bad people" as she calls them, she engaged in a credit card scam and was sentenced to two years in prison, one year of which was unsuspended.
After serving her sentence, she remained on probation. In order not to fall back into the same trap, Sophea found work and resumed her life despite rumours of deportations of Cambodians. But one day in 2009, immigration officials informed her that the deportation papers from Cambodia had arrived. After a month in detention, Sophea was deported alone to Cambodia, a country she did not know and did not even speak the language. Her son, then 8 years old, stayed in the United States with his father.
Since 2002 and a bilateral agreement with Cambodia, the United States has been deporting to Phnom Penh young people of Cambodian origin like Sophéa, who have committed crimes on American soil. Residents, not US citizens, the children of Pol Pot's victims, raised in the US, are overnight sent back to the land of their ancestors, to a country they have often never known and where they have no ties. Most of them are young men, former gang members, but their stories can also be different, like Sophéa. The pace of returns has accelerated with the tightening of US migration policy: more than 2000 Khmericans are threatened with deportation. To advance their cause, the 1Love Cambodia collective, of which Sophéa is a member, has decided to turn to the Cambodian government to ask for a revision of this bilateral agreement. Since August 2017, negotiations between the American and Cambodian governments have been underway.
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